mardi 30 décembre 2008

Affaire Faurisson / Dieudonné, suite (et fin, on l'espère)

Ce matin (30 décembre), entre 6 h et 6h30, j'ai été très choquée d'entendre le journaliste d'Inter parler de l'invitation par M. Dieudonné de "l'historien négationniste Robert Faurisson". Si l'on veut vraiment mettre en avant les titres universitaires de ce monsieur, on peut peut-être se référer à sa carte de visite qui indique : "Robert Faurisson, maître de conférences. Littérature française du XXe siècle. Spécialité: critique de textes et documents".
Rappelons que, pour être historien, il faut avoir soutenu une thèse dans cette discipline, mais il faut également se soumettre régulièrement à la critique de ses pairs (c'est la fonction des colloques et des publications dans des revues à comité de lecture), et se soumettre à une déontologie historienne qui, si elle n'interdit aucun sujet de recherche, implique la mise en oeuvre d'une méthode éprouvée (critique interne et externe des sources), la transparence quant à ses affirmations (c'est la fonction des notes de bas de page, qui sont autant de références auxquelles le lecteur peut retourner s'il veut s'assurer de la vérité du discours historique qui lui est servi) et la bonne foi.
Lors de son procès en 1981, c'est d'ailleurs à ce titre que M. Faurisson a été condamné,le tribunal déclarant que « sans avoir à rechercher si un tel discours constitue ou non une “falsification de l’histoire” [… il est avéré que] M. Faurisson manque aux obligations de prudence, de circonspection objective et de neutralité intellectuelle qui s’imposent au chercheur qu’il veut être ». Si l'historien n'a pas de "serment de Clio" comme le médecin a un "serment d'Hippocrate", il n'en demeure pas moins qu'il a une déontologie. À bon entendeur...

J'en profite pour faire un rapide tour d'horizon de ces condamnations "sur la forme" de propos négationnistes. Dans un certain nombre de procès, c’est en fait la façon de faire de l’histoire qui est jugée, la forme du travail donc, mais pas le fond. Par rapport à la jurisprudence du crime contre l’humanité, cela soulève évidemment un problème : on risque de voir le juge « dire l’histoire » ou même dire quelle est la bonne méthode historique. En fait, dans la mesure où la justice, en tant qu’institution étatique, doit rester neutre pour ne pas brider la recherche scientifique, le juge doit marcher sur des œufs. Il s’agit pour lui de se prononcer non sur le résultat du travail de l’historien, mais sur sa méthode et sa déontologie. Il ne s’agit pas de défendre une vérité officielle, mais de trancher sur la qualité du travail de l’historien.

1. Zeev Sternhell versus Bertrand de Jouvenel à propos du livre Ni droite, ni gauche : l’idéologie fasciste en France, Paris, Fayard, 2000, 543 p. (octobre 1983)
Dans cet ouvrage, Sternhell rappelle le passé du politologue Bertrand de Jouvenel et ses idées proches du fascisme. Il cherche à démontrer que l’idéologie fasciste s’est développée en France dans les années 1930 en le citant, et ce dernier le poursuit donc pour diffamation. L’historien est condamné au motif qu’il aurait dû questionner des témoins de l’époque (ce qu’il n’a pas fait) et qu’il a même récusé le témoignage de Bertrand de Jouvenel. Ce n’est pas sur l’existence ou non des faits historiques que le juge se prononce, mais sur le caractère diffamatoire ou attentatoire à la mémoire du récit de l’historien.
Intervention d’Ernst Nolte, François Furet, Raoul Girardet, Maurice Agulhon, Jean-Pierre Azéma, René Rémond, Eugen Weber, George Mosse, etc… tous à la demande de Zeev Sternhell. Ce dernier est pourtant condamné pour diffamation.

2. Affaire Bernard Lewis
L’historien américain Bernard Lewis est poursuivi par diverses associations parce qu’il nie le caractère génocidaire des massacres d’arméniens perpétrés en 1915 (mais il ne nie pas leur existence, attention !). Il est condamné par le tribunal, mais pas sur le fond de l’affaire. « Les tribunaux n’ont pas pour mission d’arbitrer ou de trancher les polémiques ou controverses qu’ils sont susceptibles de provoquer, de décider comment doivent être représentés et caractérisés tel ou tel épisode de l’histoire nationale ou mondiale », déclare le juge. En revanche, c’est la responsabilité de l’historien en tant que tel qui est engagée car « l’historien engage sa responsabilité envers les personnes concernées lorsque par dénaturation ou par falsification, il présente comme véridiques des allégations manifestement erronées ou omet, par négligence grave, des événements ou opinions rencontrant l’adhésion de personnes assez qualifiées et éclairées pour que le souci d’une exacte information lui interdise de les passer sous silence ». Lewis est donc condamné, par comparaison de son discours avec celui d’autres historiens.

dimanche 28 décembre 2008

Oui, "on peut rire de tout, mais pas avec n'importe qui" (Desproges)


À l'heure où l'humoriste (??) Dieudonné dérape encore, et invite le négationniste (je souligne, on entend trop souvent parler de "révisionniste", attitude normale en histoire) Robert Faurisson, condamné à plusieurs reprises pour avoir nié le génocide des juifs, afin de lui remettre “le prix de l’infréquentabilité et de l’insolence”, prix remis par son technicien Jacky dans “son habit de lumière”, à savoir vêtu en déporté juif (qu'est-ce qu'on se marre...), et pour sortir d'une polémique stérile dans laquelle on n'a d'ailleurs guère envie d'entrer (personnellement, j'évite de discuter avec les imbéciles), je vous invite à vous rendre au musée des Beaux-Arts de Lyon, où se tient à l'heure actuelle une magnifique exposition temporaire : "1945-1949. Repartir à zéro,comme si la peinture n'avait jamais existé". Les œuvres exposées sont peu connues, et le parcours muséographique est passionnant. En 1945, le monde se réveille du long cauchemar de la Seconde Guerre mondiale, entre joie et désespoir, joie d'une liberté retrouvée, désespoir de constater que le pire avait eu lieu. L'humanité a prouvé qu'elle était capable de se détruire elle-même, jusqu'à l'innommable. Il semble qu'il faille aujourd'hui, plus que jamais, nommer l'innommable, pour qu'il ne soit plus possible que le Zénith de Paris soit plein de spectateurs hilares à ce genre de "plaisanteries". Dans cette exposition, ce sont les diverses modalités d'expression nouvelles envisagées par les artistes au lendemain de la guerre qui sont explorées. La question centrale : "comment continuer à faire de l'art au lendemain de l'horreur ? comment exprimer ces atrocités alors même qu'elles relèvent de l'inimaginable ?".
Du coup, j'en profite pour évoquer la figure de Pierre Vidal-Naquet (1930-2007), grand spécialiste de la Grèce antique et intellectuel engagé. Né dans une famille juive, il a 9 ans lorsqu'éclate la guerre. Il raconte en ces termes sa découverte de l'histoire : « Toute ma vie a été marquée par le récit que m'a fait mon père à la fin de 1941 ou au début de 1942 de l'affaire Dreyfus [...] C'est aussi à travers l'Affaire que j'ai été formé non seulement à la politique mais à la morale et à l'histoire. » En mai 1944, ses parents furent arrêtés à Marseille puis déportés à Auschwitz où ils furent exterminés. Cette expérience l’incita plus tard à s’engager dans la vie de la cité, en tant qu’historien. Il est une des grandes figures de la lutte contre le négationnisme. La suite est à lire ici : Vidal Naquet

mardi 16 décembre 2008

Histoire et mémoire

Pour vous mettre en jambe, en attendant la conférence de Gilles Boyer sur "Histoire et mémoire" demain matin (jeudi 19 décembre), ainsi que pour préparer mon TD (pour ceux qui le suivent), je mets en ligne un dossier du Monde paru en septembre 2006 qui s'interroge sur les liens qui existent entre colonisation et immigration. Question d'actualité s'il en est.
J'y ajoute quelques liens intéressants, pour d'éventuelles lectures :
- Vers la revue Hommes & Migrations, dont le n°1228 porte sur "L'héritage colonial"
- Vers le site de l'ACHAC (Association pour la Connaissance de l'Histoire de l'Afrique Contemporaine) qui mène de très nombreux travaux sur le sujet

De la colonisation à l’immigration

mardi 9 décembre 2008

10 décembre 1948 - 10 décembre 2008 : La Déclaration universelle des droits de l'homme a 60 ans.


La réunion de l'assemblée de l'ONU au Palais Chaillot (Paris), 1948.

Et on en profite pour faire une petite mise au point, à compléter bien sûr. Je vous rappelle que la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen (1789) et la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948) sont au programme d'éducation civique en 4e, et que vous devez connaître le contenu des manuels de la 6e à la 3e pour l'ESD.

La DDHC : 17 articles mêlant des dispositions concernant les droits des Hommes (Français, étrangers ou ennemis) qui reprennent des dispositions du Droit des gens, les droits des citoyens (Français) qui rappellent ou renforcent les libertés publiques et les droits de la Société (Nation)qui sont, à proprement parler, constituants. La DDHC est intégrée à la Constitution française (cf. le préambule). Ses dispositions sont de droit positif et et, se plaçant au sommet de la hiérarchie des normes , irriguent l'ensemble du droit français.

La DUDH : Adoptée à Paris à l'initiative de la toute jeune ONU, elle compte 30 articles précise les droits humains fondamentaux. John Peter Humphrey, Eleanor Roosevelt et René Cassin en furent les principaux auteurs. Sans véritable portée symbolique, ce texte a cependant la valeur d'une proclamation de droits.

Pour compléter tout ça, évidemment, voyez le site de France culture, qui consacre ses programmes du jour à cet anniversaire. Émissions, bibliogrpahies, sites internet... tout un dossier sur le sujet. À consulter sans modération.

Au fait, il existe aussi une Convention européenne des droits de l'homme, signée à l'occasion de la conclusion de Traité de Rome. Ce texte juridique international a pour but de protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales en permettant un contrôle judiciaire du respect de ces droits individuels. Il se réfère à la DUDH. Mais là, on retrouve votre programme...

Bon travail.

jeudi 4 décembre 2008

Les lois en histoire

Une petite réflexion philosophique, sur la question des lois en histoire pour que, dans le cas d'un sujet sur les lois et l'histoire, vous ne pensiez pas seulement aux (trop ?) fameuses lois mémorielles. Bonne lecture.
Lois en Histoire

Pour réfléchir sur le concept de "génocide"


En ligne, mes notes de la conférence donnée il y a 2 ans à l'IUFM par Joël Kotek, sur la notion de "génocide", pour poser avec fermeté la définition des termes.
Docteur de l'IEP de Paris, Joël Kotek travaille au Centre de documentation juive contemporaine (CDJC). Il est secrétaire général du Centre d'études sur l'antisémitisme et la Shoah (CEESAG) et maître de conférence à l'Université libre de Bruxelles. Il enseigne aussi à l'ESJ de Lille et à l'IEP de Paris. Joël Kotek est l'auteur d'ouvrages de référence traduits en plusieurs langues.
Conf. Kotek Génocide

mardi 2 décembre 2008

Pérégrinations sur le net

On trouve parfois des merveilles sur internet. Vous pouvez consulter à l'adresse suivante : http://barthes.ens.fr/clio/outils/biblios/histhist.html une bibliographie concernant l'histoire de l'histoire et les tendances récentes de l'historiographie.

lundi 1 décembre 2008

Une fiche sur "Faits et récits" par Vincent Porhel

En ligne, une fiche sur "faits et récits" réalisée par Vincent Porhel :
Faits et récits

mercredi 26 novembre 2008

Une pensée pour Antoine


Antoine Guillot-Farneti était l'un d'entre vous. Il avait disparu depuis le début du mois de novembre. Nous apprenons aujourd'hui son décès. Ce soir, j'ai une pensée pour lui et pour sa famille. En dépit des enjeux individuels qui sont au coeur de cette année difficile que constitue une année de concours, sachons rester à l'écoute les uns des autres.

mardi 25 novembre 2008

À venir sur France Culture

On annonce pour vendredi prochain toute une journée consacrée à Claude Lévi-Strauss (il aura 100 ans le 28 novembre 2008). L'an dernier, on a déjà beaucoup parlé de cet auteur fondamental (même s'il n'est pas historien), représentant clé du structuralisme. Tout un dossier lui est consacré, consultable sur le net.

dimanche 23 novembre 2008

À noter dans vos agendas...

Le 17 décembre à 19h30, une conférence sur le sujet "De l'histoire au cinéma, et du cinéma à l'histoire" se tiendra à l'Institut Lumière en présence d'Antoine de Baecque. Voilà qui peut sans doute vous être utile, dans la perspective de la préparation de l'ESD. Cette information m'est communiquée par l'une d'entre vous, et j'en profite pour la remercier. Je vous rappelle que je suis à votre disposition pour faire passer, via le blog, toute information que vous jugeriez utile et pertinente de communiquer à l'ensemble de vos collègues.
Bon travail à tous.

vendredi 21 novembre 2008

Quand La Fabrique de l'Histoire s'en mêle...

Une émission à écouter ABSOLUMENT : La Fabrique de l'Histoire de ce jour, vendredi 21 novembre 2008. Une mise au point sur la réforme du CAPES qui nous arrive. Sur le ring, à ma droite, Patrick Garcia, initiateur avec Christian Delacroix et François Dosse de la pétition qui s'y oppose. À ma gauche : Thierry Le Goff, Directeur Général des Ressources Humaines de l'Éducation Nationale, de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche (ouf... j'ai réussi à l'écrire en entier !). Au moins, on saura que ça existe ! Le débat n'est pas aussi chaud qu'il pourrait l'être, mais c'est bien la première fois qu'on entend une argumentation et une contre-argumentation sur le sujet.

La conférence sur "Temps, temporalités, chronologie" est en ligne

Vous trouverez ci-après le PowerPoint de ma conférence du jeudi 20 novembre 2008 consacrée à "Temps, temporalités, chronologie".Temps, Temporalité, Chronologie
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mercredi 19 novembre 2008

Pour une mise au point sur le révisionnisme et le négationnisme

Un article de synthèse, clair et qui fait autorité, par Nadine Fresco, historienne et chercheuse au CNRS. En ligne.

Pour tout comprendre sur le Dimanche de Bouvines



Une excellente analyse de l'ouvrage de Georges Duby, Le Dimanche de Bouvines (1973). À lire avec le livre en main. Il faut être efficace : vous n'en lirez sans doute qu'introduction et conclusion, mais rien ne remplace le contact direct avec la prose de certains de nos grands historiens.

Un site pour la question de contemporaine

En ligne, un atlas historique de l'Europe, avec des cartes téléchargeables... De quoi s'entraîner efficacement.

mardi 18 novembre 2008

Du nouveau sur le front des "lois mémorielles"

PARIS (AFP) — Le Parlement ne doit plus légiférer sur l'Histoire ni prescrire le contenu des manuels scolaires, préconise le rapport de la mission d'information sur les questions mémorielles publié mardi, qui exclut toutefois de mettre en cause les lois existantes (Gayssot, Taubira).
Cette mission a été créée au printemps par le président de l'Assemblée nationale Bernard Accoyer (UMP) au lendemain du tollé soulevé par la proposition de Nicolas Sarkozy de "confier la mémoire" d'un enfant victime de la Shoah à chaque élève de CM2. Elle a auditionné depuis historiens, sociologues, philosophes, enseignants...
Le rapport, intitulé "Rassembler la nation autour d'une mémoire partagée", souligne d'emblée qu'il n'est pas question de revenir sur les lois mémorielles déjà votées, loi Gayssot de 1990 sur le négationnisme ou loi Taubira de 2001 sur la reconnaissance de l'esclavage.
Mais "le rôle du Parlement n'est pas d'adopter des lois qualifiant ou portant une appréciation sur des faits historiques, a fortiori lorsque celles-ci s'accompagnent de sanctions pénales".
Une recommandation qui fait écho à l'Appel de Blois lancé en octobre à l'initiative de l'association "Liberté pour l'histoire", fondée par l'historien René Rémond. Ses signataires soulignent que "dans un Etat libre, il n'appartient à aucune autorité politique de définir la vérité historique et de restreindre la liberté de l'historien sous la menace de sanctions pénales".
Plus question donc non plus, selon le rapport, d'affirmer dans la loi, comme en 2005, "le rôle positif" de la colonisation, texte qui avait dû être abrogé à la demande de Jacques Chirac, ou de reconnaître par ce biais le génocide arménien.
Députés et sénateurs pourront toujours "reconnaître des événements significatifs pour l'affirmation des valeurs de la citoyenneté républicaine" mais devront se contenter de simples "résolutions" qui, elles, n'auront pas valeur de vérité d'Etat.
En revanche, la mission demande que "toute modification significative de notre calendrier commémoratif emprunte la voie législative". Une façon de clore la polémique suscitée la semaine dernière par le rapport Kaspi, qui propose de limiter à trois - 8 mai, 14 juillet et 11 novembre - les journées nationales de commémoration.
Réaffirmant la nécessité d'un "enseignement obligatoire" de l'histoire à l'école, le rapport Accoyer souligne que le Parlement "ne doit pas prescrire le contenu des programmes" même s'il est "dans son rôle lorsqu'il décide, au titre de sa mission de contrôle de l'action du gouvernement, de se pencher sur l'enseignement de cette discipline".
Une pierre dans le jardin du ministre de l'Education, Xavier Darcos, qui avait plaidé fin octobre, devant la mission d'information, pour que le Parlement tranche ce qui doit être enseigné en histoire, avant de rectifier le tir le lendemain en refusant toute "ingérence" politique dans cet enseignement.
La mission insiste sur le fait que la classe doit rester un lieu de "connaissance" et non de "reconnaissance", allusion à la polémique déclenchée par l'initiative du chef de l'Etat
Elle encourage encore la publication de "manuels communs d'histoire" entre Etats membres de l'UE et propose de relancer la célébration de la Fête de l'Europe, le 9 mai, sous forme d'une "fête des jumelages" au niveau local.

J'EN PROFITE POUR VOUS FAIRE UN PETIT TOPO SUR LE RAPPORT KASPI (en 5 points)

Voici comment il entend lutter contre "l'inflation commémorative".
La "Commission de réflexion sur la modernisation des commémorations publiques", présidée par l'historien André Kaspi, a formulé dans son rapport cinq axes de réflexion pour tenter d'inverser une tendance paradoxale à la "désaffection" et à "l'inflation commémorative":
  • Le constat : trop de commémorations

La Commission juge les commémorations publiques ou nationales trop nombreuses. "Il n'est pas sain", écrit-elle dans un rapport de 47 pages, que leur nombre ait doublé depuis 1999 pour atteindre douze aujourd'hui. "Il n'est pas admissible que la nation cède aux intérêts communautaires et que l'on multiplie les journées de repentance" au risque "d'affaiblir la conscience nationale". Le phénomène entraîne une large désaffection et l'incompréhension, constate le rapport.

1. "Ramener les commémorations nationales à trois dates"

Pour "combattre l'inflation commémorative, même si cela coûte quelques voix aux candidats à des fonctions électives", la commission préconise de ramener les commémorations nationales à trois dates : le 11 novembre pour commémorer les morts du passé et du présent, le 8 mai pour rappeler la victoire sur le nazisme et la barbarie et le 14 juillet qui exalte les valeurs de la Révolution française.

2. Pas de "Memorial Day" à l'américaine

Elle suggère cependant une "révolution lente", constatant qu'il "est impossible de faire disparaître des jours fériés". La commission réfute par ailleurs la "rumeur sans fondement" qui lui prêtait l'intention de faire du 11 novembre un "Memorial Day" à la française, sur le modèle américain de commémoration unique.

3."Décentralisation" des commémorations

Les autres dates deviendraient des commémorations locales, régionales voire privées. De temps à autre, elles revêtiraient un caractère exceptionnel, comme la célébration en 2004 des débarquements alliés de 1944. Il appelle les collectivités territoriales à ne pas tout attendre de l'Etat central, soulignant leur "place primordiale".

4. Inventer de nouvelles formes de commémoration

Il ne suffit pas d'exprimer des exigences à l'égard de l'Education nationale et des médias, estime la commission. Il faut inventer de nouvelles formes de commémoration. Le rapport, qui évoque par exemple le slam, préconise de porter l'effort sur le tourisme de mémoire ou sur des projets pédagogiques élargissant la réflexion autour d'une date à sa signification profonde.

5. Implication des médias

Le rapport préconise, à l'intention de la presse écrite, audiovisuelle et électronique "des programmes ou des événements qui retiennent l'attention des lecteurs et des téléspectateurs".


À lire, en ligne, une réaction de Nicolas Offenstadt.

Et puis, si jamais vous aviez besoin d'un petit rappel sur ce que sont ces fameuses lois mémorielles...
Les Lois mémorielles - Textes
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Une manifestation susceptible de vous intéresser

Juste un petit post pour vous informer de la tenue d'un séminaire susceptible de vous intéresser pour la question d'histoire moderne, le vendredi 28 novembre à 9 h00. Je sais qu'elle se tient à Grenoble, mais l'organisateur est vraiment une pointure, et on peut déléguer, en envoyant un membre de votre groupe de travail qui partage ensuite les informations glanées. À bon entendeur...
Paix Religion
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dimanche 16 novembre 2008

Nouveautés en méthodologie

Je ne le dirai jamais assez : pas de réussite au concours sans méthode. Les exercices auxquels vous devrez bientôt vous soumettre sont très formalisés et très techniques : on n'improvise pas une dissertations si l'on ne s'est pas entraîné, et si on ne connaît pas les règles du jeu. C'est le but de ces fiches méthodologiques : vous donner les clés techniques, vous expliquer comment se joue le CAPES.
D'abord, pour éclaircir une notion qu'on croit souvent maîtriser, ou qu'on a souvent mal comprise, ou encore qui inquiète : "comment élaborer une problématique ?". Car sans problématique, pas de bonne dissertation.Élaborer une problématique
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Ensuite, les conseils nécessaires pour faire face à une dissertation en histoire.La Dissertation en Histoire
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Non seulement il faut lire tout ça, mais il faut aussi pratiquer. ENTRAÎNEZ-VOUS, par petits groupes, en temps limité. PARTICIPEZ aux concours blancs qui vous sont proposés. SOLLICITEZ vos enseignants pour leur rendre des copies éventuellement.
Bon travail à tous.

Matériaux pour l'histoire de notre temps


La BDIC (Bibliothèque de Documentation Internationale Contemporaine) publie une revue passionnante : les Matériaux pour l'histoire de notre temps. Cette revue publie des études novatrices, de chercheurs français et étrangers, sur les relations internationales et le monde contemporain. Depuis 1985 et jusqu'en 2002, 54 numéros sont parus, tous consultables en ligne sur le site Persée

En janvier-mars 2007 paraissait un numéro spécifiquement consacré aux usages publics de l'Histoire de France.

Au sommaire :
Robert Franck, Éditorial (excellent)
Régis Meyran, "Vers de nouvelles formes d'usage du passé ?"
Entretien avec Benjamin Stora, "L'Histoire ne sert pas à guérir les mémoires blessées"
Jean-Luc Bonniol, "Les usages publics de la mémoire de l'esclavage colonial
Entretien avec Jean-Pierre Dozon, "La “question noire” illustrée par l'histoire longue du colonialisme français"
Claude Liauzu, "Entre mémoires et histoire : controverses sur les enjeux du passé colonial"
Michel Wieviorka, "Histoire et Nation : le divorce"
Annette Wieviorka, "Malaise dans l'histoire et torubles de la mémoire"
Entretien avec Gérard Noirriel, "Combattre les usages mémoriels"
Olivier Pétré-Grenouilleau, "Passé / présent. Quelques réflexions sur une incrustation"

Pétition de soutien à l'école maternelle

L'enseignement secondaire n'est pas le seul à être menacé. On se mobilise aussi pour la maternelle, cette "exception française" dont nous avons toutes les raisons d'être fiers.

Signez pour la maternelle

Manifeste du 5 novembre



MANIFESTE du 5 NOVEMBRE
Depuis sa création le 5 novembre 1921,
l’AGEEM réaffirme avec force :

OUI à l’école maternelle française publique, laïque et gratuite pour tous
Seule école ouverte à tous les enfants quelles que soient leurs origines, leurs cultures et leurs conditions sociales.

OUI à l’école maternelle française publique, laïque et gratuite pour tous
Dont les valeurs sont celles de la République française

OUI à l’école maternelle française publique, laïque et gratuite pour tous
Qui accorde toute sa place à l’enfant, l’élève, le futur citoyen
Qui considère l’enfant dans sa globalité
Qui lui donne le temps de s’approprier les savoirs
Qui vise la construction et l’épanouissement de sa personne
Qui propose d’apprendre ensemble en étant acteur de ses apprentissages
Qui privilégie le jeu, la manipulation, l’expérience sensible et l’accès à la pensée symbolique

OUI à l’école maternelle française publique, laïque et gratuite pour tous
Qui permet à l’enfant de maîtriser le langage
Qui favorise la culture artistique, littéraire et scientifique
Qui place le corps aux sources de l’éducation

OUI à l’école maternelle française publique, laïque et gratuite pour tous
Qui est un espace de prévention avec des partenaires : les Réseaux d’aide aux élèves en difficulté, le personnel de santé scolaire, la protection maternelle et infantile

Avec AGEEM, dites OUI à l’école maternelle française
Publique, laïque et gratuite pour tous !

Signez la pétition en ligne.


"Qu'est-ce qu'un événement ?" Suite...

Pour poursuivre la réflexion, un article sur le sujet du TD de la semaine dernière : "Qu'est-ce qu'un événement ?", très éclairant.

Il m'a été signalé par un de mes étudiants, soucieux de partager ses lectures et découvertes. Je vous invite, bien sûr, à faire tous de même en m'adressant vos suggestions par mail : muriel.salle@laposte.net.

vendredi 14 novembre 2008

Délais de communication des archives : ce qui a changé

Sous forme d'un tableau comparatif : "loi de 1979" / "loi de 2008", tout ce qu'il faut savoir sur les délais de communication des archives. Ultra pratique (et trouvé dans le dernier numéro de L'histoire) :Délais de communication des archives
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Utilisation du document en histoire

Là encore, il y a matière à réflexion pour les futurs enseignants que vous êtes. Comment utiliser le document dans l'enseignement de l'histoire ? Pour amorcer la réflexion, voir ci-joint : Usage du document
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Entre histoire universitaire et histoire enseignée

La question tombe souvent en ESD, même si vous n'êtes pas supposés avoir une idée de la manière dont on enseigne telle ou telle question. Vous n'aurez pas de sujet du type : "Enseigner la Révolution française en classe de 4e". En revanche, il est toujours utile, ne serait-ce que pour vous préparer au métier qui sera le vôtre l'an prochain, de réfléchir aux rapports qui existent entre histoire universitaire et histoire enseignée, parce qu'adapter son discours à un auditoire de jeunes non spécialistes ça n'est pas "vulgariser" au mauvais sens du terme.
De la lecture pour y penser :Histoire enseignée versus Histoire universitaire
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Un enseignement sans histoire ?

À l'heure où les inquiétudes les plus multiples pèsent sur l'enseignement de notre discipline, et où l'on parle de remiser l'histoire au rayon des humanités en option, il faut sans doute se réinterroger sur le sens de notre enseignement. Un article du Monde de l'Éducation pour y réfléchir : "Un Enseignement sans Histoire ?", Le Monde de l'Éducation, Avril 2005
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En prime, voilà de quoi réfléchir aux finalités de l'enseignement de la discipline : Finalités de l'enseignement de l'histoire
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TD n°4 : L'événement

Le TD n°4 consacré à la question de l'événement est en ligne : TD n°4. Événement
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À compléter par la lecture de l'article suivant.
Les médias ont interprété les attentats du 11 septembre 2001 comme un événement inédit et fondateur. Cette valeur historique, construite à partir de récits et d’images, a clos sa signification, la figeant dans ce hiatus : le 11-septembre 2001 révèle un nouveau monde forcément menaçant.

Conférence Histoire des femmes et du genre

Ma conférence est en ligne : Conférences HFemmes
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Bon travail.

mercredi 12 novembre 2008

Rapport du CAPES Session 2008

Le rapport du CAPES est en ligne. Une lecture instructive très recommandée...

jeudi 6 novembre 2008

La conférence Michelle Zancarini est en ligne

La conférence de Michelle Zancarini sur "Histoire politique et Histoire du temps présent" sera très bientôt en ligne (fichier PowerPoint). Merci de votre patience : Hist pol et HTP
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vendredi 31 octobre 2008

En kiosque


Le hors-série du Nouvel Obs', dont le titre très "grand public" pourrait (devrait ?) vous faire fuir est cependant à consulter. Au-delà de "L'Histoire en procès. Manipulations, mythes et tabous", il y a des choses à tirer de cette lecture, qui n'est au demeurant pas difficile, voire divertissante. L'article de Pierre NORA sur "la politisation de l'histoire" a le mérite de souligner que le phénomène n'est pas nouveau, même si le phénomène a sans doute changé de proportions.

Au sommaire (hollywoodien...) :
I. La France et son passé
La politisation de l'histoire (Pierre Nora)
Le tribunal de l'opinion (Jacques Revel)
Sarkozy ou l'histoire à l'estomac (Christophe Prochasson)
La Révolution (toujours) revisitée (Yann Fauchois)
1918-2008 : le retour de l'union sacrée (Stéphane Audouin-Rouzeau)
Fusillés "pour l'exemple" (Anne Rasmussen)
La faute à Clemenceau ? (Jean-Noël Jeanneney)
La France malade de la commémoration ? (Pascal Ory)

II. Regards croisés
France-Allemagne : un passé enfin passé ? (Pierre Monnet)
Algérie : sortie d'hiver (Benjamin Stora)
La langue en partage (Jean Lacouture)
Israël-Palestine : le double déni (Henry Laurens)
Dette de sang (Pap Ndiaye)
La mémoire à vif de l'esclavage (Myriam Cottias)
L'Espagne existe-t-elle ? (Jordi Canal)
Les assassins de la mémoire arménienne (Hamit Bozarslan)

III. Qui sait de quoi hier sera fait ?
Oublier le communisme ? (Sophie Cœuré)
Quand Poutine récrit l'histoire (Stéphane Courtois)
Ukraine : un génocide par la faim (Nicolas Werth
De quoi l'Ostalgie est-elle le nom ? (Étienne François)
Un mythe fondateur négatif (Étienne François)
Divorces à l'italienne (Marc Lazar)
Chinois, si vous saviez ! (Jean-Luc Domenach)
Nouveaux historiens et récits anciens (Shlomo Sand)

IV. À quoi sert l'histoire ?
Doit-on tout dire (Christophe Prochasson)
Les musées disent-ils la vérité ? (Laurence Bertrand Dorléac)
Le juge et l'histoire (Marc Olivier Baruch)
La bataille des archives (Vincent Duclert)
Le présent pour seul horizon (entretien ave François Hartog)
L'avenir de l'histoire (Jacques Julliard)

Politique et enseignement de l'histoire : le débat continue.

Voici les dernières déclarations fracassantes de notre ministre de l'Éducation nationale :
Il est légitime de demander à la représentation nationale son avis sur les programmes. Pour ce qui est des questions mémorielles (...) les grandes dates, les héros, les événements que la Nation doit célébrer, c'est aussi à la Nation de le dire (Source : AFP)

On peut même l'écouter en ligne, sur le site de l'Assemblée nationale (28octobre 2008).
De quoi s'agit-il exactement ? L'article suivant, paru sur le site du Monde le 30 octobre, permet d'y voir plus clair :

"Xavier Darcos fait volte-face après avoir relancé la polémique sur les lois mémorielles"

Faute d'avoir été tranchée, la question des rapports entre le pouvoir politique et l'enseignement de l'histoire reste des plus sensibles. Pour être intervenu avec fracas sur ce terrain miné, le ministre de l'éducation nationale, Xavier Darcos, a été contraint de faire machine arrière.

Auditionné, mardi 28 octobre à l'Assemblée nationale, par les députés de la "mission d'information sur les questions mémorielles", M. Darcos s'était demandé s'il "ne faudrait pas qu'une bonne fois pour toutes ce que nous considérons comme devant être enseigné aux élèves soit prescrit par la représentation nationale". "Pour ce qui est de l'histoire en particulier, je me demande même si ça ne s'impose pas", avait-il ajouté.

Ces propos n'ont pas manqué de raviver la polémique née en 2005 sur un article de loi qui - avant d'être abrogé à la demande de Jacques Chirac - enjoignait aux enseignants d'évoquer le "rôle positif de la présence française outre-mer". Interrogé par l'AFP, l'historien Jean-Pierre Azéma a "condamné sans appel cette nouvelle tentative de vouloir imposer ce qui doit être enseigné en histoire". Soulignant que "la liberté pédagogique" est "absolument nécessaire", il a jugé "inadmissible que le pouvoir politique gouvernemental et parlementaire puisse imposer ce qui doit être recherché et a fortiori enseigné".

A la sortie du conseil des ministres, mercredi, M. Darcos a assuré qu'il souhaitait simplement "recueillir l'avis de la représentation nationale sur la manière dont les programmes sont orientés". L'enseignement de l'histoire, a-t-il ajouté, est "une affaire qui concerne les historiens et les professeurs d'histoire, et je serai très vigilant à ce qu'il n'y ait aucune ingérence dans la pédagogie de l'histoire venue du politique". Le ministre a aussi rendu publique une lettre adressée à Pierre Nora, président de l'association Liberté pour l'histoire, l'assurant qu'il n'entrait "aucunement" dans ses "intentions de demander au Parlement de se substituer à la communauté des historiens pour définir le contenu des programmes d'histoire".

Luc Cédelle

De quoi alimenter encore votre réflexion. Surtout si vous écoutez ce qu'en dit Antoine Prost dans la Fabrique de l'histoire d'aujourd'hui

jeudi 30 octobre 2008

Dernier numéro de la revue Vingtième Siècle

Je vous recommande la lecture du dernier numéro de la revue Vingtième Siècle qui porte sur "Italie, la présence du passé", afin de sortir un peu du seul champs de l'hexagone et pour enrichir vos réflexions épistémologiques.

La présentation qu'en fait l'éditeur est alléchante :
L'originalité de ce numéro tient à ce qu'il fait connaître non seulement les travaux historiques en cours en Italie, mais également ceux de chercheurs français, tant historiens que sociologues ou économistes, spécialistes de l'Italie. Ainsi, des historiens italiens dressent trois bilans de la recherche en histoire politique, sociale et culturelle de l'Italie républicaine. Puis, Italiens et français confrontent leurs analyses sur sept thèmes essentiels: l'héritage du fascisme, la postérité de l'antifascisme, l'État et la nation, les mutations de la société, l'essor économique, les métamorphoses de la culture, la place de la religion.
Se noue de la sorte un dialogue franco-italien marqué du sceau de l'histoire. Une histoire qui, ces dernières années, en Italie, est à vif car au cœur de controverses politiques enflammées. Le passé travaille dans un pays secoué par une profonde crise politique et d'identité.
Comme quoi, le présentisme est un régime d'historicité qui ne se limite pas à nos frontières. Rappelons que cette notion est développée par François Hartog (Régimes d'historicité. Présentisme et expériences du temps, Paris, Seuil, 2003, 258 p.). Il montre que le régime moderne d’historicité ancré sur l’idée de progrès cède peu à peu la place à un nouveau régime qu’il nomme "présentisme" né des traumatismes dus au XXe siècle (guerres, échec des idéaux révolutionnaires...). Pour l’auteur les années 1970 marquent une hypertrophie du présent de la consommation qui valorise l’éphémère. L’économie des médias consomme du présent au point que François Hartog n’hésite pas à présenter le 11 septembre comme un événement qui "se donnant à voir en train de se faire, s’historicise aussitôt et est déjà à lui-même sa propre commémoration". Ce présent "dilaté" et inquiet qui se matérialise en trois mots : mémoire, patrimoine, commémoration. Hartog considère que la parution des Lieux de Mémoire dirigés Pierre Nora est la marque du changement. "La mémoire n’est plus ce qu’il faut retenir du passé pour préparer l’avenir qu’on veut" , c’est le présent qui choisit les choses du passé qui sont dignes de mémoire, qui constituent le patrimoine, dans un monde qui doute de son avenir.

Bonne lecture.

mardi 28 octobre 2008

Cette semaine sur France Culture

Cette semaine, l'émission radiophonique La Fabrique de l'Histoire consacre 4 émissions aux guerres de religion (question de moderne au programme pour les concours cette année) :
Toute cette semaine, en écho avec le programme de l'agrégation d'histoire cette année, la Fabrique vous propose une série d'émissions sur les guerres de religion. Ou - en d'autres termes - les affrontements religieux qui ont secoué l'Europe au XVe et XVIe siècle au moment de la Réforme.
Et cette série démarre par un grand entretien avec l'un des meilleurs spécialistes de ces questions en France, Denis Crouzet, autour des thèses parfois iconoclastes qu'il développe dans un livre à paraître aux éditions Champ Vallon, Dieu en ses royaumes.
Avec lui en effet, on commence d'abord par réviser et relativiser la vision classique des "affrontements religieux" dans l'histoire (car les récits servent presque toujours à justifier la propre foi de celui qui les écrits).
Denis Crouzet insiste de son côté sur l'environnement spirituel du XVe-XVIe siècle, et en particulier sur les innombrables peurs qui traversent l'Europe (en partie relayées par le développement du livre) : la fin du monde paraît imminente - on est pile 1500 ans après la mort du Christ...
C'est dans ce contexte d'angoisse que surgit donc la Réforme. Et ce discours rationnel, qui envisage un Dieu plus éloigné, dont on ne peut connaître les intentions, rassure ceux qui rejoignent Calvin.
A partir de là, Denis Crouzet nous livre sa version des événements et nous explique comment la violence de certaines attaques (croix sciées, statues souillées, etc.) peut alors faire basculer une religion d'amour en religion de haine.
Mais, dans cette proposition, il ne cesse d'insister sur les apories en histoire et s'insurge à sa façon contre des récits qui se voudraient trop explicatifs, trop précis sur des questions qui conservent leur part de mystère.
Se méfier, peut-être, des manuels et de certaines réformes en cours (strictement scolaires celles-là !!).
À écouter d'urgence.

Quelques recommandations bibliographiques, trouvées dans la foulée en consultant le site de la radio :
  • Denis Crouzet, Les Guerriers de Dieu : la violence au temps des troubles de religion, vers 1525-vers 1610, Champ Vallon, 2005.
Tout commence vers 1525, quand monte en France l’angoisse du châtiment divin. Dans le ciel et sur la terre apparaissent des signes qui disent l’imminence du Jugement. Voici le temps des guerriers de Dieu : d’une violence d’abord intérieure surgit la force conquérante d’un prophétisme panique qui ordonne la mise à mort des hérétiques. S’opposant à la violence désacralisatrice des huguenots, la violence mystique des catholiques culmine en août 1572 lors du double massacre, royal et populaire, de la Saint-Barthélemy. La Ligue marquera l’ultime retour de l’angoisse prophétique, force agissante d’un long XVIe siècle, qui vise à unir le peuple au Christ de la Passion. La rupture surgit en la personne d’Henri II qui, en pacifiant le royaume, est l’artisan d’un désangoissement et d’un désenchantement du monde. La "félicité du royaume", ordonnée par le roi de raison d’une monarchie absolue et resacralisée, est à la source de notre modernité. Un livre "destiné à occuper dans l’historiographie du XVIe siècle, non seulement religieux, mais spirituel et mental, une place capitale." (D. Richet)
- présentation de l'éditeur -


  • Denis Crouzet, Dieu en ses royaumes : une histoire des guerres de religion, Champ Vallon, 2008.
Dieu en ses royaumes évoque les affrontements religieux dans la France des années 1490-1610 en racontant une histoire saturée d’angoisses et de rêves.
Au commencement, il y eut le tragique d’une grande peur de la damnation face à un Dieu toujours plus distant et menaçant. La fin des Temps approchait et chacun se devait de se préparer au face-à-face avec le Christ, dans la pénitence, la prière et une obsession de pureté exigeant l’éradication violente de tous ceux qui attisaient par leur impiété ou leur hérésie la fureur divine. En contrepoint de ce noircissement culpabilisant du monde humain, Calvin proposa au fidèle une voie alternative et libératoire qui supprimait l’angoisse du salut en portant le fidèle à vivre dans une «bonne crainte» de Dieu.
Au plus profond des guerres de Religion qui opposèrent « papistes » et « huguenots », ou plutôt au cœur même de la dynamique des fixations confessionnelles, s’installait la violence d’un conflit entre hantise eschatologique et désangoissement : deux royaumes de Dieu s’affrontaient.
Dans le cours de cette histoire saccadée, le centre de gravité dramatique se déplaça : le pouvoir monarchique tenta d’entraver la crise en fixant dans la personne royale la mission messianique d’établissement d’un ordre de paix transcendant le jeu mortifère des imaginaires. Dieu en ses royaumes raconte alors l’histoire d’un second grand conflit, opposant les rêves apocalyptiques et violents des catholiques intransigeants à l’utopie de modération d’un roi Christ luttant contre les passions de ses sujets, une modération dont les grandes figures furent Michel de l’Hospital, Catherine de Médicis, Charles IX et son frère Henri III.
C’est à la monarchie d’Henri IV qu’il revint de clore cette tragédie par le truchement d’un autre jeu de symbolisation. L’Histoire fut alors érigée, à travers la figure d’un roi providentiel guidant ses sujets vers un nouvel âge d’or, en une instance de résorption des angoisses et des peurs eschatologiques.

- Présentation de l'éditeur -

dimanche 26 octobre 2008

Méthodologie pour l'épreuve de hors-programme ("HP" pour les intimes)

Les agrégatifs qui fréquentent ce site vont être contents : voici une méthode pour préparer l'épreuve dite de "hors programme", tout au long de l'année, et le jour J. Car cette épreuve-reine de l'agrégation d'histoire ne tombe pas tout à fait sur n'importe quoi, contrairement à ce qu'on croit parfois. Par exemple, pensez à l'actualité, notamment aux dates anniversaires (et il me semble justement avoir repéré un article l'année 888, celle de la désintégration de l'empire de Charlemagne, dans L'Histoire de novembre 2008). Pensez aussi que nous fêtons le 150e anniversaire de la parution de L'Origine des Espèces de Darwin, le 90e anniversaire de l'armistice de 1918... Ci-joint, un début de méthode pour faire face : La méthode en HP
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