mardi 28 octobre 2008

Cette semaine sur France Culture

Cette semaine, l'émission radiophonique La Fabrique de l'Histoire consacre 4 émissions aux guerres de religion (question de moderne au programme pour les concours cette année) :
Toute cette semaine, en écho avec le programme de l'agrégation d'histoire cette année, la Fabrique vous propose une série d'émissions sur les guerres de religion. Ou - en d'autres termes - les affrontements religieux qui ont secoué l'Europe au XVe et XVIe siècle au moment de la Réforme.
Et cette série démarre par un grand entretien avec l'un des meilleurs spécialistes de ces questions en France, Denis Crouzet, autour des thèses parfois iconoclastes qu'il développe dans un livre à paraître aux éditions Champ Vallon, Dieu en ses royaumes.
Avec lui en effet, on commence d'abord par réviser et relativiser la vision classique des "affrontements religieux" dans l'histoire (car les récits servent presque toujours à justifier la propre foi de celui qui les écrits).
Denis Crouzet insiste de son côté sur l'environnement spirituel du XVe-XVIe siècle, et en particulier sur les innombrables peurs qui traversent l'Europe (en partie relayées par le développement du livre) : la fin du monde paraît imminente - on est pile 1500 ans après la mort du Christ...
C'est dans ce contexte d'angoisse que surgit donc la Réforme. Et ce discours rationnel, qui envisage un Dieu plus éloigné, dont on ne peut connaître les intentions, rassure ceux qui rejoignent Calvin.
A partir de là, Denis Crouzet nous livre sa version des événements et nous explique comment la violence de certaines attaques (croix sciées, statues souillées, etc.) peut alors faire basculer une religion d'amour en religion de haine.
Mais, dans cette proposition, il ne cesse d'insister sur les apories en histoire et s'insurge à sa façon contre des récits qui se voudraient trop explicatifs, trop précis sur des questions qui conservent leur part de mystère.
Se méfier, peut-être, des manuels et de certaines réformes en cours (strictement scolaires celles-là !!).
À écouter d'urgence.

Quelques recommandations bibliographiques, trouvées dans la foulée en consultant le site de la radio :
  • Denis Crouzet, Les Guerriers de Dieu : la violence au temps des troubles de religion, vers 1525-vers 1610, Champ Vallon, 2005.
Tout commence vers 1525, quand monte en France l’angoisse du châtiment divin. Dans le ciel et sur la terre apparaissent des signes qui disent l’imminence du Jugement. Voici le temps des guerriers de Dieu : d’une violence d’abord intérieure surgit la force conquérante d’un prophétisme panique qui ordonne la mise à mort des hérétiques. S’opposant à la violence désacralisatrice des huguenots, la violence mystique des catholiques culmine en août 1572 lors du double massacre, royal et populaire, de la Saint-Barthélemy. La Ligue marquera l’ultime retour de l’angoisse prophétique, force agissante d’un long XVIe siècle, qui vise à unir le peuple au Christ de la Passion. La rupture surgit en la personne d’Henri II qui, en pacifiant le royaume, est l’artisan d’un désangoissement et d’un désenchantement du monde. La "félicité du royaume", ordonnée par le roi de raison d’une monarchie absolue et resacralisée, est à la source de notre modernité. Un livre "destiné à occuper dans l’historiographie du XVIe siècle, non seulement religieux, mais spirituel et mental, une place capitale." (D. Richet)
- présentation de l'éditeur -


  • Denis Crouzet, Dieu en ses royaumes : une histoire des guerres de religion, Champ Vallon, 2008.
Dieu en ses royaumes évoque les affrontements religieux dans la France des années 1490-1610 en racontant une histoire saturée d’angoisses et de rêves.
Au commencement, il y eut le tragique d’une grande peur de la damnation face à un Dieu toujours plus distant et menaçant. La fin des Temps approchait et chacun se devait de se préparer au face-à-face avec le Christ, dans la pénitence, la prière et une obsession de pureté exigeant l’éradication violente de tous ceux qui attisaient par leur impiété ou leur hérésie la fureur divine. En contrepoint de ce noircissement culpabilisant du monde humain, Calvin proposa au fidèle une voie alternative et libératoire qui supprimait l’angoisse du salut en portant le fidèle à vivre dans une «bonne crainte» de Dieu.
Au plus profond des guerres de Religion qui opposèrent « papistes » et « huguenots », ou plutôt au cœur même de la dynamique des fixations confessionnelles, s’installait la violence d’un conflit entre hantise eschatologique et désangoissement : deux royaumes de Dieu s’affrontaient.
Dans le cours de cette histoire saccadée, le centre de gravité dramatique se déplaça : le pouvoir monarchique tenta d’entraver la crise en fixant dans la personne royale la mission messianique d’établissement d’un ordre de paix transcendant le jeu mortifère des imaginaires. Dieu en ses royaumes raconte alors l’histoire d’un second grand conflit, opposant les rêves apocalyptiques et violents des catholiques intransigeants à l’utopie de modération d’un roi Christ luttant contre les passions de ses sujets, une modération dont les grandes figures furent Michel de l’Hospital, Catherine de Médicis, Charles IX et son frère Henri III.
C’est à la monarchie d’Henri IV qu’il revint de clore cette tragédie par le truchement d’un autre jeu de symbolisation. L’Histoire fut alors érigée, à travers la figure d’un roi providentiel guidant ses sujets vers un nouvel âge d’or, en une instance de résorption des angoisses et des peurs eschatologiques.

- Présentation de l'éditeur -

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